Publicité

Nordiques: Les rêves, la pensée magique et…la réalité


La belle volée de bois vert que m'a value ma dernière chronique sur l’utopique retour des Nordiques me fait sourire. Certains commentaires, surtout parmi les plus méprisants, m’ont fait crouler de rire. La susceptibilité exacerbée de certains paysans ne cessera jamais de m’amuser. Il faut croire qu’au Québec, terre où le dogmatisme de l’Église Catholique a fait place à une certaine forme de dogmatisme idéologique dicté par le bon peuple et une certaine presse qui gouverne selon les sondages, il est désormais interdit de diverger d’opinion. Ce qui, vous l’aurez deviné, n’est pas ma tasse de thé. Oui, je suis élitiste, mais cela me force aussi à m’ériger contre toute forme de manipulation de la masse populaire.

Je suis un adepte de la pensée critique fort impopulaire au sein d’un peuple encore soumis dans son inconscient désir de former un troupeau de moutons qui bêlent derrière son beau Saint-Jean Baptiste. Juste pour vous écœurer, je serais tenté de vous  rappeler que c’était un Essénien mais la plupart d’entre vous ne sauriez même pas de quoi je parle alors je m’abstiendrai. Contentons-nous donc de limiter la discussion à ce retour hypothétique, et, je persiste et signe, plus qu’improbable, des Nordiques.

Je n’ai rien contre le rêve. J’en ai contre la dogmatisation du rêve collectif. Comme tout bon amateur de sport, je rêve constamment. Je rêve de voir les Fighting Irish de Notre-Dame gagner le BCS. Imaginez combien serait mon plaisir de voir mes chers Stingers remporter la Coupe du football universitaire canadien. Imaginez mon bonheur si les Steelers devaient gagner le prochain Super Bowl. Je n’y crois pas, mais j’en rêve.

Je rêve de voir les Alouettes gagner la 100e Coupe Grey à Toronto. Pas un rêve impossible, mais je doute qu’ils puissent vaincre les Lions. Je rêve de revoir le Canadien remporter une Coupe Stanley avant ma mort. Ça ne risque pas d’arriver, mais j’ai le droit de rêver. Des rêves, j’en ai à la tonne. Ce qui ne m’empêchera jamais d’en avoir contre les marchands de rêves. J’en ai contre tous ces nouveaux prêtres et cardinaux qui vous imposent leurs rêves et qui, comme jadis le clergé, le font à vos dépens et avec notre argent!

Je suis un athée, un hérétique et je m’assume. Si quelqu’un est assez idiot pour vouloir acheter mon âme,

elle est à vendre. J’attends les offres. Je renie volontiers le catholicisme qui m’a été imposé parce que c’était encore la norme au début des années soixante. Parfois, j’ai envie de renier le Québec dans lequel vous voulez m’enfermer. Je me sens de plus en plus apatride ces jours-ci. J’aime le Canada, mais je l’aime comme j’aime tout plein de pays étrangers. C’est vrai que c’est un beau pays et que les gens y sont sympathiques. Et, en prime, ces gens-là aiment le football autant que moi, et surtout plus que vous. Ça ne change rien. Ce n’est pas mon pays. Ce n’est pas le mien. Surtout pas celui de Stephen Harper. Pas sûr que j’aimerais mieux celui que nous proposera Justin Trudeau.

J’aime le Québec, mais pas celui que nous propose Pauline Marois et les dinosaures du Parti Québécois. Je n’aime pas davantage les autres prétendants. J’ai la démocratie triste ces jours-ci. Cela ne m’empêche pas d’aimer le Québec pour sa joie de vivre, son hospitalité et sa tolérance sauf lorsqu’il vient le temps de débattre. Quand le Québec se lance dans les débats, il perd toutes ses qualités. Le Québec n’a pas encore gagné la maturité pour débattre qu’ont nos cousins français. On n’aime pas la chicane, comme disait ma grand-mère, alors on fait tout le contraire. Tu es d’accord, sinon je t’insulte. C’est malheureusement ça la réalité dans la tribu du Québec.

Ce sont les gens raisonnables contre les crottés pour paraphraser une tristement célèbre policière, ou ex-policière du SPVM. Moi qui fus jadis un ardent nationaliste convaincu ne sais plus trop si le Québec est davantage mon pays que le Canada imprimé sur mon passeport. Peut-être ne suis-je que Montréalais. Et encore, contrairement à ce que vous croyez hors du 514, Montréal n’est pas une entité géographique monolithique.

Le Québec ne l’est pas plus et même si j’en ai visité toutes les régions je ne saurais l’affirmer. Je n’ai pas eu l’impression que les gens de l’Abitibi et ceux du Saguenay ou de la Gaspésie partageaient tous les mêmes valeurs. Je me suis peut-être trompé. Après tout, je ne suis qu’un pauvre Montréalais. Que puis-je comprendre des Provinciaux? Peut-être que la langue française, malgré des variantes d’accents qui peuvent dérouter même un Montréalais, se vit de la même façon partout sauf dans la maudite métropole.

Vous aimez Céline? C’est votre droit. Elle est sympathique, mais sa musique m’ennuie. Je préfère encore et toujours Zappa. C’est mon droit. Vous aimez le Cirque du Soleil? Je suis bien content du succès planétaire de la gang à Guy Laliberté, un gars des plus sympathiques. Bravo! Mais ce n’est pas pour moi.
Je le répète, pour les esprits obtus qui auraient mal lu mes chroniques sur le sujet, je n’ai rien, mais absolument rien, contre le retour des Nordiques dans la LNH. Tant mieux, ou tant pis, si ça arrive. Là n’est pas la question. Je n’y crois pas, du moins, pas dans un avenir rapproché, et c’est comme ça. Vous avez le droit d’y croire? Bien sûr que vous en avez le droit. Comme j’ai aussi le droit de croire en tous mes rêves les plus fous.

Moi je rêve du retour des Expos, de pouvoir retourner au Stade Olympique pour m’époumoner, pas dans la morne galerie de presse, mais bien dans les estrades, et d’encourager nos Z’Amours. Je regarde les présentes séries de championnats et, même si je suis encore debout dans mon salon quand un match en arrive à la neuvième manche et que l’équipe de mon choix est à un retrait de la victoire ou de la défaite, même si j’ai encore des frissons en voyant untel frapper une balle fausse ou s’élancer sur une courbe, je ne peux qu’éprouver un malaise indicible parce que Montréal ne fait plus partie des Majeures.

Oui, je rêve du retour des Expos. Mais je n’y crois pas. Encore moins quand j’entends cet hurluberlu de Guy Bertrand fantasmer d’un immense complexe sportif qui non seulement nous redonnerait du baseball majeur, mais aussi des Jeux Olympiques. Quelle belle idée! Mais je n’y crois pas plus. Faut croire que mon pessimisme ne concerne pas seulement le Gros Village (qui en sera un à mes yeux tant et aussi longtemps que ses habitants prendront ombrage de ce désobligeant, mais ô combien amusant, sobriquet).

Des rêves, j’en ai encore plusieurs même à mon âge. Je rêve du jour où tous nos matches de football universitaire attireront des foules de plus de 50 000 spectateurs au Stade Olympique. Pour tout vous dire, je rêve même du jour où ce magnifique édifice qui est malgré les récriminations devenu un symbole du paysage montréalais, deviendra trop petit pour nos ambitions sportives.

Je rêve du jour où les Alouettes trouveront le Stade Percival-Molson trop petit même pendant les matches préparatoires. Je rêve du jour où l’on disputera le championnat universitaire canadien, peu importe les équipes impliquées, qu’elles soient du Québec, de l’Ontario, des Maritimes, des Prairies ou de l’Ouest, devant plus de 60 000 maniaques de football. Je n’y crois pas, mais je permets d’en rêver. Je suis un rêveur pessimiste, mais je m’assume.

Je rêve du jour où l’Impact de Montréal ne sera plus le jouet d’un seul riche héritier, mais bien celle de tout le Québec et que le petit Stade bâtit à la hâte à l’ombre du mât du grand Stade ne suffira plus pour accueillir des partisans endiablés venus applaudir les plus fabuleux joueurs du monde. Oui, j’ai connu la glorieuse époque de la LNAS et du Manic et je rêve encore de voir le soccer nord-américain devenir un sport majeur. Je n’y crois pas plus, même pas à moyen terme, mais j’en rêve.

Des rêves, j’en ai plusieurs. Mais il m’arrive de me réveiller et de passer en mode réalité. C’est un défaut que j’assume. Un autre maudit défaut typique des gens qui sont nés et qui ont grandi à Montréal.

Je suis un rêveur sceptique, parfois trop pessimiste. J’ai beau avoir fait le tour du monde, je ne suis pas capable de me débarrasser de ce défaut là! Je ne m’en excuserai même pas…